Les limites stratégiques de la terreur
A partir de quel moment un régime démocratique peut-il recourir à la terreur pour préserver sa nature et ses intérêts ? Au-delà de l'inépuisable questionnement moral posé par la question, certains analystes s'interrogent sur le "bon usage de la terreur". Dans une note publiée par l'Institut français de relations internationales (IFRI), Marc Hecker pose le problème de la "terreur stratégique" qu'il définit ainsi : "elle a pour but de faire comprendre à la population que la neutralité n'est pas une option en faisant primer la responsabilité collective sur la responsabilité individuelle. Quand des soldats chargés de "pacifier" une zone pénètrent dans un village, égorgent le bétail et brûlent les granges, ils pénalisent certes les combattants irréguliers dont la survie dépend de la nourriture fournie par les paysans ou volée à ces derniers. Mais ils entendent aussi faire comprendre aux villageois qu'ils n'ont d'autre choix que de soutenir la contre-insurrection."
Appliquée à une plus grande échelle, la terreur stratégique trouve un écho favorable parmi certains stratèges : "les défenseurs des moyens de terreur soutiennent qu'en période de guerre, l'efficacité tactique doit primer, quitte à faire parfois quelques compromis avec la morale." L'auteur de la note rappelle que la dimension humaine est au coeur des actes de terreur car comme le disait Raymond Aron, le terrorisme est une action violente dont les effets psychologiques sont supérieurs aux effets physiques. Marc Hecker estime que "la population joue un rôle très important, quelque soit le type d'opposition asymétrique (...) Elle est bien sûr la cible directe des attaques." En appui de son analyse, il rapporte les cas de la France et des Etats-Unis qui ont recouru à la terreur en Algérie et en Irak.
En conclusion, Marc Hecker souligne que "toute démocratie tenté par la généralisation et la systématisation de méthodes de terreur parviendra peut-être à des résultats tactiques mais risque fort d'hypothéquer ses chances au niveau stratégique".
A lire :
- Du bon usage de la terreur (PDF - 140 Ko)
Sur le même thème :